15/7/2025
Le ghosting professionnel révèle des mécanismes psychologiques profonds. Analyse de ses causes et impacts par Jean-Paul Lugan, psychologue et coach.
Par Jean-Paul Lugan, psychologue, coach, expert en préparation mentale et auteur de « Santé mentale, la méthode M.I.N.D à portée de tous. » – 14 juillet 2025
Le ghosting ne concerne plus seulement les applis de rencontre.
Il s’est désormais bien installé dans le monde professionnel : un recruteur qui ne donne plus de nouvelles après un entretien, un client enthousiaste qui disparaît après avoir reçu une proposition, un salarié qui ne se présente plus au travail sans prévenir.
Et je parle ici d’expérience.
Il y a quelques mois, une responsable RH d’une mutuelle me contacte pour un projet sur le management. J’écoute, je creuse, je bâtis une proposition sur mesure. Et puis… plus rien. Silence radio. Malgré plusieurs relances – par téléphone, par mail, par signaux de fumée si j'avais pu – aucune réponse. Pas un mot. Pas même un « non merci ».
Quelques jours plus tard, un directeur de centre de gestion me demande un projet sur-mesure pour célébrer les 25 ans de son organisation. Même énergie. Même implication. Même disparition.
Je n’ai pas été blessé par un refus. J’aurais tout à fait compris un « non merci » ou « ce n’est plus d’actualité ».
Ce qui me dérange, c’est le vide relationnel. Ce silence poli, passif, mais profondément irrespectueux.
On pourrait croire que ces silences sont dus à un manque de temps, un oubli, ou un embarras passager.
Mais répété, banalisé, le ghosting devient un symptôme relationnel préoccupant.
Pas simplement par paresse. Souvent, ghoster trahit un inconfort psychologique ou émotionnel, parfois bien plus profond qu’on ne l’imagine.
1. L’évitement affectif
Certains ont une peur viscérale de la confrontation, du désaccord ou de l’engagement.
Dire non, c’est s’exposer. Alors on préfère s’éclipser, en espérant que l’autre comprendra « à demi-mot ».
2. L’immaturité émotionnelle
Ne pas répondre, c’est éviter de prendre ses responsabilités.
Pour certaines personnes, refuser ou expliquer serait « trop difficile émotionnellement ».
Alors, elles disparaissent pour ne pas avoir à assumer.
3. Le narcissisme ordinaire
Quand l'autre devient un simple outil, un prestataire, un fournisseur parmi d’autres, on n’éprouve ni empathie ni besoin de fermeture.
Ce type de ghosteur ne mesure pas les conséquences de son silence, tout simplement parce qu’il ne les considère pas.
4. Les troubles de la personnalité (plus rares mais bien réels)
Dans certains cas extrêmes, le ghosting peut être associé à des comportements passifs-agressifs, antisociaux ou borderline.
Le silence devient alors une arme, une manière de punir ou de reprendre le contrôle.
Le ghosté, lui, n’a pas les codes. Il reste dans l’attente, piégé dans une boucle de doutes :
– « Ai-je mal fait ? »
– « Ai-je dit quelque chose de déplacé ? »
– « Pourquoi ce silence brutal ? »
Ce mécanisme génère un stress psychologique diffus, une sidération mentale, et parfois une profonde remise en question.
Et ce n’est pas qu’une blessure d’ego : c’est une forme de violence douce, insidieuse et silencieuse.
Parce que le ghosting est en train de devenir un réflexe relationnel banalisé, alors qu’il sape les fondements d’un lien professionnel sain.
Dans les entreprises, cela provoque :
– Des pertes de temps considérables
– Un coût d’image (les prestataires et candidats ghostés en parlent)
– Une baisse de confiance mutuelle
– Un effritement de la culture managériale, basée sur le courage et la clarté
Dire « non », ce n’est pas violent. C’est clair, respectueux et adulte.
Refuser une proposition, donner une réponse négative, dire « ce n’est plus d’actualité » ne demande que quelques mots.
Mais ces mots valent de l’or, car ils maintiennent la relation vivante, même lorsqu’elle s’interrompt.
C’est tout l’objet de mes formations.
Apprendre à dire, à poser des mots justes, à fermer proprement une porte pour ne pas claquer la relation.
Avec la méthode M.I.N.D., je propose un cadre concret pour :
– Identifier ses mécanismes d’évitement
– Cultiver une communication claire
– Faire de la relation une priorité, même dans l’action
Le ghosting n’est pas un bug de communication.
C’est un indicateur de maturité relationnelle.
Une entreprise (ou un professionnel) qui ghoste systématiquement ses interlocuteurs donne à voir son manque de clarté, de courage et de considération.
Et c’est bien dommage, car une simple réponse, même brève, vaut toujours mieux qu’un long silence.
Ces constats s’appuient sur mon expérience, mes recherches et mes accompagnements auprès de dirigeants, managers et collaborateurs, autour de la santé mentale, du management de soi et de la prévention des risques psychosociaux.
📖 Pour aller plus loin : lire mon livre Santé mentale, la méthode M.I.N.D à portée de tous
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